Linus Pauling interview

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LINUS PAULING

LA DERNIÈRE INTERVIEW

Propos recueillis à Gorda (Californie), le 14 avril 1994.

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« Les vitamines ne m’intéressent pas beaucoup d’un point de vue scientifique. »

Il y a 10 ans disparaissait Linus Pauling, seul homme récompensé à deux reprises par le prix Nobel. Quelques semaines avant sa mort, il m’accordait dans sa propriété de Gorda (Californie) deux heures d’entretien à bâtons rompus – sa toute dernière interview. Il est revenu à cette occasion sur les années noires du McCarthysme, la polémique autour de la Vitamine C, et livrait sa nouvelle théorie sur les maladies cardio-vasculaires. Voici pour la première fois dans son intégralité la dernière interview de Linus Pauling.

Thierry Souccar : La revue scientifique britannique New Scientist a dit de vous que vous êtes l’un des vingt plus grands scientifiques de tous les temps, de pair avec Newton, Darwin et Einstein. A quoi attribuez-vous votre succès en tant que scientifique ?

Linus Pauling : Ma réussite est en grande partie due à une connaissance plus vaste que celle de la plupart des scientifiques, en particulier une connaissance extensive de la chimie empirique, et aussi une bonne connaissance des mathématiques et de la physique. Voyez-vous, aujourd’hui des étudiants me demandent quelles matières étudier pour se lancer dans la nutrithérapie. Je leur dis : n’étudiez pas la nutrition. Etudiez la physique et la chimie, la biochimie, assurez-vous une base solide. Les autres matières, vous pouvez les apprendre dans les livres, mais la connaissance scientifique de base, vous ne l’apprendrez pas dans les livres. Vous avez besoin des stimuli qu’apportent la classe et le professeur.

Vous avez grandi dans un petit village de l’Oregon. A quoi ressemblait le petit Linus Pauling ?

Je suis né dans un village de 500 habitants. Il y a toujours 500 habitants aujourd’hui, il est resté le même… Ce qui m’intéressait, c’était les propriétés des minéraux. Pourquoi certaines substances sont colorées et d’autres pas ? Pourquoi certains minéraux sont durs et d’autres mous ? Donc, j’ai accumulé une sorte de savoir empirique, et en même temps je posais un grand nombre de questions, je lisais un grand nombre de livres. Quand j’avais neuf ans, mon père, un pharmacien, a écrit une lettre au rédacteur en chef du journal local. Il disait : « Mon fils a lu tous les livres alentour. Pourriez-vous suggérer quelques titres qui lui conviendraient ? »

C’est à cette curiosité qu’on doit votre essai de 1931, The Nature of the Chemical Bond, qui fait toujours référence ?

Oui. J’ai obtenu un doctorat de chimie, mais mes deux premiers livres, The Structure of Line Spectra et Introduction to Quantum Mechanics, étaient essentiellement des ouvrages de physique, plutôt que de chimie. En 1926, grâce à une bourse, j’ai eu la possibilité de me rendre dans les grands laboratoires d’Europe, où l’on tentait de trouver des applications à la théorie quantique. Cette année-là, j’ai publié le premier article qui appliquait les mécaniques quantiques aux systèmes comportant plus d’un électron. A la fin des années 20, j’étais la seule personne au monde à posséder une bonne compréhension des mécaniques quantiques, et une connaissance étendue de la chimie. C’est ainsi que j’ai pu développer la théorie quantique que j’ai appelée « résonance ».

Pour la plupart des gens, votre nom est associé à la nutrition et à la médecine. Mais vous n’avez jamais reçu d’enseignement formel dans ces deux disciplines.

C’est vrai. Je n’ai jamais suivi un cours de biologie, ni même de biochimie. Lorsque j’ai publié La Vitamine C et le rhume en 1971, un nutritionniste a écrit que je n’avais pas eu un seul cours de nutrition, et que j’échouerais probablement à l’examen de première année (Rires.) La biochimie ne m’a jamais beaucoup intéressé.

La parution de ce livre, dans lequel vous souteniez que des méga doses de Vitamine C peuvent prévenir le rhume, a déclenché une polémique considérable avec la communauté médicale. Vous y attendiez-vous ?

Non, je croyais que tout le monde apprécierait mon livre. Les gens seraient heureux, ils souffriraient moins ; les médecins seraient satisfaits, on les dérangerait moins pour une maladie aussi banale. J’ai donc été très surpris que l’establishment médical me tombe dessus ! Bien sûr, les scientifiques se sont dits : « Je ne connais rien aux vitamines, mais Linus Pauling a eu tant de fois raison dans le passé qu’il a probablement raison cette fois encore ». Mais les médecins et les autorités médicales ne le savaient pas, ils ne connaissaient ni ma réputation, ni mes contributions. Et ils furent visiblement de mauvaise foi. C’est une idée qu’il leur était difficile d’accepter.

Pour quelle raison ?

Je me suis souvent posé cette question. Lorsqu’on a commencé d’utiliser des molécules médicamenteuses en médecine, les médecins se sont demandé : « Si nous avons une substance intéressante pour traiter une maladie, quelle quantité faut-il donner ? » Ils se sont dits : « Les agents chimio thérapeutiques peuvent sauver la vie de quelqu’un, mais ils sont aussi toxiques. On ne peut pas augmenter sans cesse les doses. Alors, ils se sont mis d’accord sur les doses qui sont habituellement efficaces. Ensuite, ils sont arrivés à la Vitamine C. Ils se sont posé la même question : « Qu’est-ce qu’elle contrôle ? Le scorbut ! Donc, nous allons déterminer les doses nécessaires pour prévenir le scorbut ». C’est ce qu’ils ont fait, et on a depuis les doses admises pour la Vitamine C. Il ne leur est pas venu à l’esprit que des doses massives de Vitamine C pouvaient avoir un intérêt supplémentaire contre d’autres maladies, et qu’elles améliorent la santé en général. Ou ça leur est venu à l’esprit, et ils l’ont rejeté. Voilà ce qui s’est passé, même si de nombreux docteurs ont observé les bénéfices pour leurs patients de méga doses de Vitamine C. Quoi qu’il en soit, la profession médicale était braquée contre les vitamines à hautes doses. Et elle l’est toujours.

Prenez-vous toujours 18.000 mg de Vitamine C par jour ?

Qui, oui. Oh…, parfois j’oublie. Je répartis les doses au long de la journée, et parfois ça me sort de l’esprit. Mais oui, oui, je prends à peu près cette quantité. Et bien sûr d’autres vitamines aussi. De la vitamine E. Essentiellement ce que le docteur Hoffer (voir encadré) donne à ses patients : 800 mg de vitamine E, 1.000 à 2.000 mg de niacine [vitamine B3 ou PP] et du sélénium. Hoffer prescrit ce traitement orthomoléculaire à ses patients depuis des années.

Vous ne cachez pas être atteint d’un cancer. N’est-ce pas paradoxal chez un homme qui a fait la promotion de la Vitamine C comme agent anti-cancer ?

C’est exact, j’ai un cancer de la prostate. Ce type de cancer survient généralement avant 70-75 ans, et comme j’en ai 93, je pense que les hautes doses de Vitamine C que je prends m’ont fait gagner une vingtaine d’années. En 1966, j’ai donné une conférence sur la médecine orthomoléculaire et j’y ai manifesté le désir de vivre 20 ans de plus. A la suite de la conférence, j’ai reçu une lettre d’un biochimiste, Irwin Stone, qui me souhaitait de vivre non pas 20 ans, mais 50 ans de plus. Il ajoutait qu’un régime riche en Vitamine C me procurerait longtemps une bonne santé, et il joignait une série d’études à l’appui de son hypothèse. Je les ai trouvées convaincantes et c’est ainsi que j’ai commencé avec mon épouse à prendre des doses élevées de Vitamine C.

Aujourd’hui, vous soutenez que la Vitamine C pourrait prévenir l’athérosclérose !

Oui. Mon dernier article sur ce sujet a été publié il y a deux ans dans le Journal of Orthomolecular Medicine. Je l’ai écrit avec le Dr Matthias Rath. Il s’intitule : « Le déficit en Vitamine C est la cause des maladies cardio-vasculaires ». Nous indiquons aussi que la lysine peut prévenir ces maladies. J’ai publié trois articles sur les effets de suppléments quotidiens de 5 g de Vitamine C et 5 g de lysine chez des malades cardiaques.

Sur quoi votre hypothèse repose-t-elle ?

Eh bien, tout le monde est d’accord pour dire que ces maladies commencent par une lésion des parois vasculaires. Il y a quelques années, je me suis demandé pourquoi de telles lésions apparaissent. Et la réponse est probablement que l’organisme manque de Vitamine C. La Vitamine C est indispensable à la synthèse de collagène et d’élastine, les substances qui rendent les vaisseaux forts et sains. Si vous manquez de Vitamine C, vous ne fabriquez pas assez de collagène, ou alors il est de mauvaise qualité. La plupart des animaux fabriquent de la Vitamine C, et ils n’ont pas le type de maladies cardio-vasculaires que nous avons. Il leur arrive d’avoir des problèmes, mais pas dans les régions de stress, où le pouls est fort, comme les artères coronaires ou le cerveau. La plupart des gens manquent de Vitamine C et le déficit en Vitamine C est la première cause des maladies cardio-vasculaires.

Qu’est-ce qui a motivé votre intérêt pour les vitamines ? La science, la provocation, ou le souci du bien commun ?

Il y a un psychiatre à San Francisco qui écrit en ce moment un livre. Il aura pour titre Linus Pauling, l’Humaniste. Il soutient que tout ce que j’ai accompli dans ma vie, je l’ai fait pour des raisons humanistes. Je lui ai répondu que je ne suis pas d’accord. La plupart des choses que j’ai faites, c’était pour satisfaire ma curiosité. Mais dans un certain sens, mon intérêt pour les vitamines vient peut-être du sentiment qu’elles peuvent contribuer de manière importante à la santé des gens, plutôt que d’une curiosité purement scientifique. Les vitamines ne m’intéressent pas beaucoup d’un point de vue scientifique.

C’est tout de même « Pauling l’Humaniste » qui a milité contre les essais nucléaires dans l’atmosphère.

Après la guerre, j’ai décidé qu’il était important d’empêcher une catastrophe nucléaire et que je ferais bien de prendre mes responsabilités. Jusqu’en 1945, il me semblait impossible que le monde arrive à se débarrasser de l’immoralité de la guerre. J’avais l’impression que nous devions nous en accommoder. Quand les bombes atomiques ont été créées, avec leur terrible pouvoir, il m’a semblé qu’il y avait là une chance d’en finir avec la guerre. Au début, j’ai simplement dit en quoi une guerre nucléaire serait terrible, et qu’il était préférable de rechercher une coexistence pacifique avec l’Union soviétique, mais ensuite, il est devenu clair que les essais en eux-mêmes étaient dangereux.

A cette époque, vous avez été accusé par le sénateur Joseph McCarthy de sympathies communistes…

Oui. Les membres du Congrès m’ont demandé si j’étais communiste, ou si je l’avais été. Je leur ai répondu que je me tenais à l’écart des doctrines. Je leur ai dit ceci : « Personne ne me dit ce que je dois penser, sauf madame Pauling ». On a demandé à ma femme pourquoi je m’étais mis dans une telle situation de conflit avec le gouvernement, et pourquoi j’avais continué mon action en dépit des problèmes que cela me posait, et que cela posait à ma femme et à mes enfants. Elle a répondu : « C’est qu’il est têtu. Il n’est pas prêt à changer d’opinion, même sous la pression ». Ava disait que j’étais entêté, mais je ne voulais simplement pas être réduit au silence par McCarthy. J’ai continué par respect pour moi-même. A cette époque, mon passeport m’a été retiré. La responsable du bureau des passeports a dit que mes déclarations anti-communistes n’avaient pas été suffisamment convaincantes ! (Rire.) Finalement, le ministère des Affaires étrangères m’a rendu mon passeport en 1954 ; ils n’ont pas eu assez de tripes pour m’empêcher d’aller en Suède recevoir mon prix Nobel. Au même moment, j’étais attaqué par l’Union soviétique. Les Soviétiques disaient que mes théories en matière de chimie étaient incompatibles avec le matérialisme dialectique, et qu’aucun scientifique soviétique bon patriote ne devait les utiliser. En fait, quand je me suis rendu en URSS, j’ai constaté qu’ils continuaient d’appliquer mes idées, mais sous des artifices. Finalement, au bout de 5 ans, les autorités ont publié un nouveau rapport sur l’état de la chimie et ont déclaré qu’on pouvait utiliser les idées du professeur Pauling, mais pas sous le nom de « théorie de résonance ». On devait les utiliser sous le nom de « théorie des états intermédiaires ». Bref, il leur avait fallu 5 ans pour reconnaître que c’était une erreur que d’attaquer mes théories. Elles étaient trop bonnes (Rire.).

Vous avez des convictions politiques ?

Oh, oui. Eh bien, on pourrait dire que je suis une sorte de socialiste modéré, d’obédience progressiste. En général, j’ai soutenu des candidats démocrates.

Ca ne vous a pas empêché de manifester contre John Kennedy, dont vous étiez pourtant proche. Il circule d’ailleurs une anecdote savoureuse à propos de votre participation à une manifestation devant la Maison-Blanche en 1962. C’est une légende ou la réalité ?

Vous faites sûrement référence à la journée du 28 avril. Voilà ce qui s’est passé. Ava et moi avions reçu deux invitations pour se rendre à Washington ce jour-là. La première émanait d’opposants à la bombe atomique, qui nous demandait de nous joindre à la manifestation prévue devant la Maison-Blanche, en raison de la décision du Président Kennedy de reprendre les essais nucléaires dans l’atmosphère. La seconde invitation venait justement du couple Kennedy, qui nous priait d’assister à une réception donnée en l’honneur de scientifiques.

Qu’avez-vous fait ?

Eh bien nous avons défilé devant la Maison-Blanche avec des pancartes réclamant la fin des essais nucléaires. A la fin de la journée, nous avons rangé nos pancartes et nous avons traversé la pelouse pour assister à la réception. Lorsque nous sommes arrivés, Jackie Kennedy s’est penchée vers moi et m’a dit : « Croyez-vous qu’il est bien raisonnable de défiler comme vous le faites devant la Maison-Blanche ? Chaque fois que Caroline [la fille du Président, alors âgée de 5 ans] vous voit dans une manifestation, elle me demande, Qu’est ce que papa a fait de mal ? ». A ce moment, John Kennedy s’est approché et m’a dit à voix basse : « J’espère que vous continuerez longtemps à exprimer vos opinions. »

Votre bureau est encombré d’articles et de livres. Sur quoi travailliez-vous avant mon arrivée ?

Sur des questions de physique nucléaire, la structure du noyau atomique. Je ne suis pas satisfait de ce que les spécialistes de physique nucléaire disent sur la structure du noyau, les niveaux d’énergie. Et j’ai développé une hypothèse alternative – ma théorie personnelle de la structure nucléaire. J’ai publié 3 ou 4 articles dans Proceedings of the National Academy of Sciences et j’ai même réussi à en placer 1 ou 2 dans des revues de physique. Mais les physiciens les ignorent, ils ne s’y intéressent pas. Un peu comme les médecins ignorent les vitamines !